Projet Hollande: en faux-semblant et dangereux
Nouvelle rédaction
Comme le personnage qu’il s’est façonné, au physique et au moral, le programme présidentiel de François Hollande est un « faux-semblant ». Un immobilisme camouflé derrière quelques mesures sans ambition ; une crainte et un refus du changement (sinon pour revenir en arrière) qui, dans le monde en mutation rapide qui est le nôtre, représente le plus grand danger; une absence de mesures économiques, sociales et environnementales fortes, que cachent des formules habiles et des chiffrages trompeurs.
Première surprise et premier faux-semblant, le candidat socialiste qui utilise une bonne part de son temps de parole (abusivement accordé par des médias complaisants) à critiquer violemment la politique mais aussi le comportement ou la personne même de Nicolas Sarkozy ( ne reculant pas devant l’insulte), adopte vis-à-vis des axes de la politique suivie par le Président une attitude très mesurée, presque approbatrice.
L’objectif de réduction du déficit est le même (en en retardant malheureusement d’un an la réalisation !) que celui du Président. Il approuve ou au moins accepte, la réforme capitale des universités, celle sur le service minimum, la création du RSA, le crédit impôt-recherche, les investissements liés au « grand emprunt », la taxe sur les transactions financières, la réforme de la représentation syndicale, les droits nouveaux accordés à l’opposition, une grande partie de la réforme sur les successions et les donations, la création d’une banque pour l’industrie, la régularisation sélective « au cas par cas, sur critères objectifs » des sans-papiers.
S’il prétend, sans grande conviction, vouloir aller vers une forte diminution de la part du nucléaire, il a, semble-t-il, renoncé au démantèlement de plusieurs centrales sur la durée du quinquennat : seule Fessenheim pourrait l’être ( mais quand seront démantelées les 23 autres qui doivent l'être d'ici 2025?). Il ne reviendrait qu’à la marge sur la réforme de la taxe professionnelle qu'il avait tellement critiquée, il a renoncé à la suppression du quotient familial (qu’il dit, de manière confuse, vouloir corriger) et aux élucubrations sur la suppression du siège français à l’ONU ! Pas d’augmentation du nombre global de fonctionnaires (dit-il !), ni de leur traitement, pas de retour en arrière sur la publicité sur les chaînes publiques...
Et même sur le nouveau traité européen qu’il prétendait « renégocier », il semble qu’il demande seulement, aujourd’hui, de le « compléter » !
Il ne remet plus fondamentalement en cause la réforme des retraites, acceptant l’allongement de la durée de cotisation ( qu'il refusait!), et ne rendant possible un départ à 60 ans, que pour ceux qui auront leur 41 ou 41,5 annuités ! Mesure au demeurant très nocive, coûteuse pour l’Etat, mais aussi pour les entreprises et pour les salariés actifs.
Le candidat socialiste a donc renoncé à de nombreux changements! Mais les changements annoncés, de manière plus ou moins précise, selon sa méthode habituelle, ne permettraient pas d’aller dans le sens annoncé, c'est-à-dire la croissance et la réduction des déficits.
Quand il n’est pas « conservateur », ce qui n’est pas dramatique quand il s’agit de conserver les justes réformes de Sarkozy, le projet de François Hollande prône un retour en arrière ou un refus de réformes ou de politiques nécessaires. La réduction du coût du travail (par allègement des charges pesant sur les entreprises) est une urgente nécessité, Hollande la refuse. Comme il refuse de sortir des 35 heures, qui « plombent » notre compétitivité (en Europe, c’est en France que le temps de travail annuel est le plus bas, exception faite de la Finlande !), ou d’en atténuer les effets négatifs comme l'a fait Nicolas Sarkozy en défiscalisant les heures supplémentaires (mesure que le socialiste prétend vouloir abroger).
Ensuite, ne figure dans son programme aucune mesure de réduction de la dépense publique, qui, représentant plus de 55% du PIB, est la plus élevée du monde occidental, et nous « plombe » chaque année de 150 milliards d’€uros, par rapport à notre principal concurrent l’Allemagne. Les dépenses publiques de fonctionnement, de l’Etat ou des collectivités locales, ne seraient pas réduites, et auraient même vocation à augmenter.
Prétendre réduire le déficit public et la dette en refusant de diminuer les dépenses publiques, relève de la démagogie, et montre le côté irréaliste et insincère de ce programme. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles les centristes et François Bayrou ne pourront en aucun cas le soutenir.
Pour tenter de compenser ce refus de procéder aux économies nécessaires, Hollande est conduit à augmenter de plus de 150 milliards sur 5 ans, les impôts, déjà trop lourds en France, à annoncer une réduction drastique des niches fiscales encore existantes, touchant ainsi de plein fouet les classes moyennes et moyennes-supérieures.
Davantage de dépenses publiques, davantage d’impôts et, très logiquement, encore plus d’interventionnisme étatique, du développement des emplois publics aidés (150.000 de plus), au blocage des loyers, en passant par de nouveaux contrôles… dans une France qui étouffe déjà sous les réglementations, directives et interventions d’un Etat obèse et tentaculaire.
Alors pour tenter d’équilibrer son projet, le candidat socialiste, a recours, en plus de la hausse des impôts, à une prévision de croissance dont le taux annoncé, plus de 2%, de 2013 à 2017 n’est pas réaliste. D’autant moins réaliste qu’aucune mesure forte n’est envisagée pour stimuler la croissance et améliorer la compétitivité des entreprises. Si quelques aides sont prévues pour les PME, les entreprises subiront un accroissement de leurs charges et aucune flexibilité supplémentaire notamment en terme de temps de travail ne leur sera accordé. Et, on ne peut à la fois taxer lourdement le capital et attendre une augmentation des investissements ! Or sans investissements supplémentaires, il est vain d’attendre une relance de l’activité.
D’autant que la consommation elle-même aura du mal à progresser, les impôts supplémentaires pesant sur le pouvoir d’achat des catégories moyennes et moyennes supérieures. Par ailleurs, une mesure comme la suppression de la non-fiscalisation des heures supplémentaires, en limiterait mécaniquement le nombre, ce qui amputerait deux fois les ressources de ceux, principalement ouvriers, employés et…enseignants, qui en bénéficient aujourd’hui : en diminuant d’une part les revenus liés aux heures supplémentaires et en soumettant en outre ces revenus résiduels à l’impôt ! Et il faut être d’une grande naïveté pour croire ou d’une grande mauvaise foi pour prétendre que cette diminution des heures supplémentaire, avec la souplesse qu’elles permettent, entraînerait un accroissement des embauches en CDI !
Enfin, comment ne pas regretter certaines mesures comme le droit de vote et d’éligibilité des immigrés aux élections locales (pourquoi seulement locales d’ailleurs ?), l’abrogation de lois relatives à la sécurité, la révision inquiétante de la politique familiale, ou l’inscription inutile du principe de laïcité dans la Constitution – où elle figure déjà - qui sont marquées par l’idéologie…
Dernier faux-semblant à relever : ce n’est en réalité pas ce programme qui serait appliqué…Mais celui, plus radical et plus irréaliste encore de ce qui serait la nouvelle majorité, en cas de défaite de la majorité actuelle.
Car, au bout du compte, la Constitution étant ce qu’elle est, c’est la majorité parlementaire qui dispose du vrai pouvoir et décide : et cette majorité, socialistes/ front de Gauche/ communistes et verts, appliquerait son programme - plus proche du programme socialiste et de l’accord PS/Verts que du programme proposé par François Hollande. Et celui-ci n’aurait aucun moyen de s’y opposer. D’autant moins que l’on pourrait présager, dès la rentrée 2012, une forte pression de la rue pour que le gouvernement aille, en terme d’augmentation de salaires, d’embauches dans la fonction publique, de prise en compte de la pénibilité pour les retraites par exemple, bien au-delà de ce que promet aujourd’hui le candidat Hollande.
Il est difficile de penser que ce programme en faux semblant et que l’on peut prévoir ou craindre dangereux puisse être approuvé par une majorité de Français.
Marc d’Héré