La fin de la Kermesse de l'Unité Nationale et du culte hollandien
Nous venons de vivre deux évènements qui ont le mérite de nous ramener à la réalité.
Le premier évènement remonte à dimanche : c’est le résultat du 2ème tour de l’élection législative du Doubs, où il a fallu au candidat socialiste, dans une circonscription de gauche, la mobilisation du duo gouvernemental Valls/Cazeneuve et l’aide d’une partie du centre et de la droite, pour battre de justesse une candidate FN particulièrement faible!
Le deuxième évènement date de lundi : c’est la parution du sondage IPSOS/LE POINT qui révèle que François Hollande perd 8 points de popularité, et Valls 7.
On sort ainsi de cette période 'irréaliste" qui a vu le marketing politique et la Com’ provoquer avec peu de justification, une envolée de la popularité d’un Président (et aussi d’un Premier ministre) qui, en réalité n’a quasiment rien fait d’autre que se montrer, et se livrer à quelques déclarations habiles pour utiliser à son profit l’émotion sincère et légitime des Français à la suite des attentats islamistes.
Chapeau l’artiste ! Qui a su transformer, avec l’aide des médias qui y trouvaient sans doute leur intérêt commercial et politique, quelques gestes naturels et insignifiants en eux-mêmes, en action digne d’éloges voire d’admiration.
Mais cette histoire, car il s’agit bien d’un récit habilement ficelé et proposé aux médias, a commencé peu avant la fin de l’année 2014 et c’est Nicolas Sarkozy qui en a été le déclencheur involontaire.
Tout a commencé, en effet, avec le « retour » de l'ex président.
Pour le contrer, car cela inquiète sans doute davantage l’Elysée que ses communicants ne veulent bien le dire, ceux-ci ont déroulé auprès des médias un double argumentaire en forme de « récit » selon lequel, le retour de Sarkozy était une bénédiction car il avait une mauvaise image, était clivant et allait favoriser le regroupement de la gauche autour de Hollande, contre lui.
Et ce soutien retrouvé de la gauche au Président serait d’autant plus facile que, deuxième élément du récit, Hollande retrouvait, grâce à une croissance annoncée frémissante, de l’optimisme et de l’énergie. Il se lançait dans la deuxième phase de son quinquennat, qui le mènerait tout naturellement à la candidature en 2017, et à une victoire probable.
Quelques sondages en légère hausse et le gonflement de la bulle Macron venaient appuyer et crédibiliser ce « récit » que les médias "achetaient » avec une belle unanimité.
Et avec les vœux de fin d’année et la présence du Président sur tous les écrans début janvier tout allait continuer dans le sens de la célébration du « nouveau » François Hollande.
Puis survinrent les horribles attentats islamistes.
Réaction rapide de François Hollande, consistant à se montrer partout où il fallait être, faisant état de son émotion (réelle) et de sa compassion (sincère), passant de cellule de crise élyséenne en salle d’opération de la place Beauvau, marchant avec les uns et embrassant les autres, prenant la parole en toute occasion et appelant dans chaque discours à l’Unité Nationale…derrière lui.
C’était tellement appuyé et relevait tellement du marketing que ça aurait pu faire flop, mais les médias réagirent au quart de tour et prolongeant la période de célébration débutée depuis un mois, se sont lancés dans une glorification du Président, surjouant l’émotion , le montrant partout et répétant –sans jamais le démontrer - qu’il s’était présidentialisé, qu’il avait soudain pris une autre dimension, en devenant le corps même et l’expression de la Nation souffrante…
Et Hollande continua à ne rien faire (ce qui est depuis toujours une occupation dans laquelle il excelle) mais à se montrer et à parler partout, grave, solennel et chargé d’une émotion – réelle mais bien exposée- et d’un apitoiement dont on avait plusieurs fois par jour le témoignage et la représentation.
L’opposition, bouleversée elle aussi, ne pouvait qu’entrer dans le jeu présidentiel et, participant à l’Unité Nationale, elle augmentait forcément l’aura du Président.
Et ce fut, ainsi, le mois de la « Grande Kermesse de l’Unité Nationale » et celui de la célébration du « culte hollandien »…sans que rien ni personne ne puisse s’y opposer.
Et les sondages montaient sans cesse et les médias les reprenaient en « une », et François Hollande devenait le père de la Nation, le Clémenceau de la "République en lutte antiterroriste" , et sans doute déjà le vainqueur annoncé de la prochaine présidentielle.
Derrière son émotion, on voyait naître chez le « Président-Dieu » (laïc, évidemment) un léger sourire d’autosatisfaction trop humaine mais après tout, compréhensible…
Mais tout a une fin ici-bas, les Présidents-Dieux laïcs ne sont pas immortels et le vide, même habilement dissimulé, ne peut manquer d’apparaître au grand jour !
Les premiers craquements se manifestèrent avec la fin de l’Unité Nationale que Hollande cherchait à étirer au maximum et voulait transformer en soutien à sa politique économique et sociale.
Cette fin se manifesta clairement à l’occasion de l’emploi inaproprié du mot apartheid par le Premier ministre. La droite et Nicolas Sarkozy le critiquèrent, la gauche, un peu gênée elle aussi , se lança dans des attaques violentes contre l’ex président…On revenait à la normale…
Et dans le même temps, le peuple français ouvrait les yeux sur l’irréalité et le caractère chimérique de la période traversée et retrouvait peu à peu l’opinion qui était la sienne sur François Hollande et les socialistes, comme en témoignent les deux évènements de dimanche et lundi rappelés plus haut.
Progressivement, on en revint à la réalité et le Président retrouva, peut-être un peu dépité, la « dimension » qui était la sienne.
Marc d’Héré